Portrait d’Agriculteur : Nicolas Galpin, Jeune Agriculteur de l’Essonne en Agriculture de conservation
L’année dernière, lors de mon tour de la moisson, j’ai eu le plaisir d’aller passer une journée sur l’exploitation de Nicolas Galpin, céréalier dans l’Essonne, du côté d’Auvernaux. J’ai rencontré Nicolas lorsque je travaillais aux Jeunes Agriculteurs d’Ile-de-France ouest. Je me souviens, c’était quelques semaines après mon arrivée lors de l’Assemblée Générale du syndicat. Le thème était « quelles techniques culturales pour une agriculture francilienne durable ? ». Nicolas y présentait l’agriculture de conservation qu’il a adopté depuis 2009.
L’agriculture de conservation : qu’est-ce que c’est ?
Nous avons déjà abordé la question lors de mon passage au Vietnam chez Luong.
Pour rappel, il s’agit d’un « système agricole durable et rentable qui tend à améliorer les conditions de vie des exploitations au travers de la mise en œuvre simultanée de trois principes : le travail minimal du sol, les associations et rotations culturales et la couverture permanente du sol ».
Tout d’abord, l’idéal recherché est la suppression totale du travail du sol. Cependant, souvent, il subsiste un léger travail du sol tel que du déchaumage (travail en superficie) ou du décompactage (travail en profondeur mais sans retournement du sol). C’est cette deuxième technique que Nicolas pratiquait au départ, jusqu’à l’arrivée du strip-till.
Ensuite, la couverture du sol peut prendre deux formes. Elle peut être simplement constituée de résidus des cultures précédentes que l’on laisse sur place. Dans l’autre cas, il s’agit de plantes implantées entre deux cultures dans le but de protéger le sol.
Enfin, l’association ou la rotation des cultures permet de diminuer les mauvaises herbes qui ne sont plus détruites par le labour.
Adieu labour…
En 2002, Nicolas rencontre des agriculteurs membres du Centre d’Etude des Techniques Agricoles (le CETA). C’est un groupement d’environ 120 agriculteurs franciliens mettant en commun leurs expériences et des moyens financiers afin d’améliorer leurs exploitations aux niveaux techniques, économiques et sociaux (plus d’infos sur leur site). Ils mettent notamment en place des essais agronomiques dont ils partagent ensuite les résultats. C’est cette rencontre qui a convaincu notre agriculteur d’abandonner le labour et de se lancer dans l’agriculture de conservation.
Au démarrage, Nicolas continue de travailler le sol en décompactant tous les deux ans. Quelques années plus tard, il introduit le strip-till. Il s’agit d’une technique de travail du sol localisé où seul le futur rang de semis est travaillé (Cf. ce site). Nicolas l’utilise pour les terres qu’il sème en betteraves sucrières et colza. Dans le même temps, la machine peut apporter l’engrais qui sera nécessaire à la plante. Un seul passage, deux actions !
…bonjour couvert végétal
Nicolas sème chaque année après la récolte, des plantes qui ont pour but de couvrir le sol jusqu’aux prochains semis. Ainsi, le sol n’est jamais nu et ne subit pas l’érosion du sol.
Son couvert est toujours un mélange de plusieurs plantes avec des vertus complémentaires. Le but étant non seulement de protéger le sol de l’érosion mais aussi de lui apporter des nutriments, d’aérer le sol avec un bon système racinaire et favoriser la biodiversité.
Nicolas utilise un cocktail de féveroles, lentilles, trèfles d’Alexandrie, Tournesol, phacélie, lin et moutarde.
Association de cultures
Prenons l’exemple du Colza.
Au mois de septembre, Nicolas sème un mélange de colza et de trèfle blanc nain. Cette dernière plante est une légumineuse, c’est-à-dire qu’elle va fixer l’azote de l’air et le redistribuer dans le sol grâce à son système racinaire.
Les deux plantes vont pousser et le colza va, petit à petit dépasser le trèfle. Lorsque le colza sera moissonné, le trèfle toujours présent aura à nouveau beaucoup de lumière. Il va se développer et assurer le couvert du sol jusqu’aux semis de blé.
Avantages et inconvénients de l’agriculture de conservation en Essonne
Le tout premier impact positif est la diminution de sa consommation de gazole. En effet, avec le strip-till Nicolas diminue ses passages de tracteurs dans les champs. C’est bon pour l’environnement et bon pour sa trésorerie !
Ensuite, Nicolas relève plusieurs améliorations sur l’environnement. Il a observé une forte diminution de l’érosion des sols avec une meilleure infiltration de l’eau. La biodiversité s’est énormément développée dans le sol mais aussi les alentours avec une recrudescence du gibier.
Les inconvénients principaux sont dus, justement, à ce développement de la biodiversité. Nicolas explique qu’avec l’agriculture de conservation, il y a plus de limaces et de mulots qui sont des nuisibles pour les cultures.
Afin de lutter contre ces menaces, il utilise des moyens naturels comme la mise en place de perchoir à rapaces aux abords des champs qui vont ainsi déguster les mulots. Pour les limaces, il épand un produit homologué bio.
Parlons rendement
Adopter un système agricole durable c’est bien mais si ce système est bon économiquement pour la viabilité de l’exploitation, c’est encore mieux.
Nicolas, qu’en est-il ?
« Il n’y a pas de grandes différences avec mes voisins en système labour : je dirais que les mauvaises années, mes cultures s’accrochent un peu plus que les leur car elles sont mieux implantées. Cela a notamment été le cas en 2016. Le processus d’amélioration du sol est tellement long qu’il faudra encore de longues années pour enfin voir un effet significatif. Déjà le taux de matières organiques de mes sols est passé de 1.6% en moyenne avant 2010 à 2.1% depuis en moyenne : un bon démarrage !!! ».