Paysans d'Avenir

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Rendez-vous à Thanh Yên avec Lo Van E, chef d’un groupement de producteurs de porcelets

8 mai 2016

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La maison de Lo Van E à l’intérieur

Le village de Thanh Yên au nord du Vietnam, dans la région de Dien Bien Phu, est historiquement spécialisé dans la production de porcelets. En effet, c’est la principale activité de 80-90% des habitants.

Entrepreneurs du Monde a, depuis plusieurs années, un technicien agricole qui suit les éleveurs et leur donne des formations. Cependant, Lo Van E m’explique que les formations étaient toujours théoriques si bien que les paysans, une fois seuls sur leurs exploitations, se sentaient bien démunis pour mettre en pratique leurs connaissances. C’est pourquoi cette année, Entrepreneurs du Monde teste une nouvelle manière de former les paysans.


Un projet de formation « en pratique »

porceletsIl y a un an, le technicien a réuni 10 producteurs motivés auprès desquels il allait, toute l’année, réaliser des formations pratiques. Tous ont déjà un élevage de porcelets. A chaque étape de leur élevage, le technicien vient chez eux pour leur montrer comment appliquer les différents soins. Tous les membres du groupement viennent assister à la démonstration. Ils ont au moins une formation par mois. De plus, en cas de difficulté sur leurs exploitations, les éleveurs peuvent contacter le technicien qui viendra les aider et les conseiller.

Un an après le lancement du projet, il y a eu beaucoup de retours positifs et de nombreux autres éleveurs souhaitent être intégrés au projet. L’idée d’Entrepreneurs du Monde est que chacun des 10 éleveurs formé en pratique puisse former à son tour une dizaine d’éleveurs.

Une truie heureuse !

Une truie heureuse !

La conduite d’un élevage de porcelets

Lo Van E a trois truies et, lors de ma visite, 18 porcelets. Il garde ses truies de 2 à 10 ans. Avant, il pouvait les élever même plus de 10 ans mais depuis quelques années, les éleveurs de la région combinent race locale (Lon Co) et européenne afin que les truies soient plus productives. Le revers de la médaille est qu’elles ont une durée de vie réduite. Lorsque la productivité d’une truie diminue, c’est-à-dire que le nombre de porcelets par portée baisse ou qu’ils ne naissent pas en bonne santé, il est temps de l’envoyer à « la réforme ». Autrement dit, à l’abattoir. « Lo Van E » va choisir une truie en bonne santé parmi ses petits et l’élever pour remplacer celle qui a été condamnée à nourrir les Hommes ».

Mâle de race locale avec lequel Lo Van E croise ses truies

Mâle de race locale avec lequel Lo Van E croise ses truies

Une truie a, en moyenne, une vingtaine de porcelets par an en deux portées. L’insémination est réalisée de manière naturelle avec les mâles d’un voisin. La gestation va, ensuite, durer 3 mois et 22 jours.

Après leur naissance, l’éleveur fait des injections de fer aux porcelets à 3 et 10 jours. Le technicien explique que le fer est nécessaire au développement et à la digestion des bébés. Il les rend plus forts et plus résistants aux maladies.

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Dans le cycle de formations « pratiques », le technicien encourage les éleveurs à faire vacciner les porcelets. Il existe de nombreuses maladies qui se développent à 3-4 mois dues à la digestion et contre lesquelles il faut vacciner les porcelets à un et deux mois. Le système digestif du porcelet est très fragile, en particulier après le sevrage et est parfois victime dun  parasite générateur d’obstruction, de perforation, de congestion intestinales et d’hémorragie souvent fatales. Jusqu’aujourd’hui, les éleveurs ne vaccinaient pas nécessairement. En effet, vendant leurs porcelets à un mois et demi, ce n’est pas eux qui étaient pénalisés en cas de maladie.

Suite aux formations, ils ont commencé à vacciner systématiquement. Ils ne peuvent pas imputer le coût du vaccin sur leur prix de vente (la concurrence est rude). Néanmoins, le coût n’est que de 30 000 Dong par cochonnet (1,18€). Cependant, ils voient cela comme un gage de qualité. En effet, les engraisseurs vont vite se rendre compte que les porcelets issus de ces élevages ne tombent pas malades et viendront donc se fournir chez eux plutôt que chez les autres.

Les premières semaines, les porcelets tètent leur mère mais très rapidement, ils commencent à s’intéresser à la nourriture que leur sert l’éleveur. Il s’agit d’un mélange de fourrage, maïs, son de blé et légumes du jardin. Le fumier est récupéré pour être ensuite épandu dans la rizière familiale.

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Porcelets de 11 jours sur l’exploitation de Lo Van E

Lo Van E vend ensuite les porcelets un mois et demi à d’autres éleveurs qui vont les engraisser.

« Pourquoi ne pas les engraisser lui-même ? » me direz-vous. Lo Van E m’a indiqué que le prix de vente des porcelets était beaucoup plus intéressant que celui de la vente de viande.

Pour un porcelet d’un mois et demi, il perçoit un million de Dong (38,90€). Après engraissement, le prix de vente est de 45000 Dong par kilogramme (1,75€). Sachant qu’un cochon fait environ 80kg à ce moment-là, il rapporte 3 600 000 Dong (140€), soit un profit de 2 600 000 Dong (101€) auquel il faut encore enlever le coût de la nourriture. Lo Van E considère que le prix n’est pas assez intéressant par rapport au travail que cela représente. De plus, dans ce village, les paysans sont loin du marché. Aussi, pour vendre les cochons engraissés, les éleveurs sont obligés de passer par un intermédiaire qui pousse à la baisse des prix lors de l’achat. A l’autre bout de la filière, le consommateur paie un prix beaucoup plus élevé. C’est donc l’intermédiaire qui réalise le plus de bénéfices, m’explique Lo Van E.

Lo Van E en train de nourrir une de ses truies

Lo Van E en train de nourrir une de ses truies

Un grand merci à Valérie Robin pour son aide dans la rédaction et la correction de cet article!

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